
Patrick Martin à France Info : Echec du conclave sur les retraites : « Il faut que le dialogue social se poursuive »
Au micro de France Info le 24 juin, Patrick Martin a commenté l’échec du conclave sur les retraites suite à l’ultime réunion des partenaires sociaux, le 23 juin. Il a dit que le Medef répondrait présent pour la nouvelle rencontre proposée par la Premier ministre. Tout en déplorant l’échec de la négociation il se dit confiant pour trouver une solution à condition que l’on donne les clés aux partenaires sociaux.
Il faut que la démocratie sociale occupe tout son champ
« Je crois qu'il est important de tenir le dialogue avec les syndicats et avec le gouvernement lui-même. Cette affaire n'est pas la fin du monde, elle est importante, mais au regard de l'actualité, on mesure la relativité de ce sujet Cela n'enlève rien à la conviction qu’a le Medef, qu'il faut que le dialogue social se poursuive et que la démocratie sociale occupe tout son champ. (…) Nous nous sommes prêtés de bonne foi à cet exercice, quand même 18 réunions, quatre mois et demi de négociations… nous avons fait des propositions très robustes, très sérieuses, je pense qu'on doit pouvoir les faire avaliser. La solution existe, qu'on nous donne les clés, nous nous arrangerons entre nous, et cela ira beaucoup mieux. (…) Certaines organisations ont voulu régler dans les moindres détails ce sujet des retraites, il y a eu des points de blocage, c'est dans l'ordre des choses, c'est déjà arrivé dans l'histoire, alors il y a deux solutions : soit on va au blocage définitif, soit on enjambe ces blocages, on prend acte des avancées, très significatives que le Medef a pu faire, notamment sur les carrières des mères de famille. »
La réforme des retraites a aussi une dimension économique
« Cette réforme des retraites a bien sûr une dimension sociale, mais elle a aussi une dimension économique. Ce sur quoi, fondamentalement, nous ne sommes pas d'accord, c'est sur l'intention de certaines organisations syndicales de dégrader l'ordre de cette réforme. Or, cette réforme, elle vise à quoi ? Elle vise à équilibrer dans la durée les régimes de retraite, mais elle vise par ailleurs à augmenter le taux d'emploi, c'est-à-dire à générer de la richesse. Que le Medef défende la croissance, la création de richesses et de pouvoir d'achat, ce n’est quand même pas condamnable ! »
Des avancées très significatives
« Sur la pénibilité, nous avons fait des avancées très significatives, qui n'étaient même pas imaginables en début d'année. Mais nous avons également fait des avancées sur la prévention. Il me semble un peu plus intelligent d’éviter les épreuves de santé que de devoir ensuite les compenser (…) Nous avons signé, d'ailleurs avec un certain nombre d'organisations syndicales présentes au conclave, un accord senior au mois de novembre dernier, qui prend en compte ces situations à la fois sur le plan de la santé et des reconversions professionnelles. (…) Il y a un certain nombre de personnes qui peuvent partir avant l'âge légal. C'est parfaitement justifié quand il y a des vrais problèmes d'usure professionnel. Ça ne l'est pas quand ça permet de partir avant l’âge légal à des gens qui, au motif qu'ils ont fait des stages, et ensuite des études supérieures et qui ont exercé des métiers qui ne sont pas éprouvants. »
Il faut créer de la richesse
« Les préoccupations de nos concitoyens sont pouvoir d'achat et la pérennité des régimes sociaux. Pour le pouvoir d'achat, il faut créer de la richesse. Moins vous avez des personnes en emploi, moins vous créez de la richesse. Ensuite, la pérennité des régimes sociaux. Nous avons martelé qu'il fallait équilibrer pour commencer le rendement de la réforme Borne. Et ensuite, l'équilibre global en 2030. Il manque malgré tout 6,5 milliards d'euros. »
Prenons la main sur la gestion des retraites de base
« Prenons la main sur la gestion des retraites de base. Appliquons, une gestion responsable comme on le fait sur les retraites complémentaires et les choses s'apaiseront et les solutions viendront. Je pense qu'on n'est pas loin d'un accord, mais il faut savoir, à un moment donné, mettre de côté un certain nombre de points de friction ou d'opposition. Il ne faut pas perdre de vue la finalité économique et en termes d'emploi de cette réforme. Et il faut que nous prenions la main sur la gouvernance des retraites de base. Je vous garantis que tout ira mieux. »
Pas d’augmentation du coût du travail
« Ce que je dis au Premier ministre et qu'il entend, c'est qu'il ne faut pas qu'un éventuel accord se traduise par une augmentation du coût du travail, des augmentations de cotisations pour les entreprises, et pour les salariés. La compétition économique internationale s'intensifie d'une manière incroyable, incroyable : la Chine, les États-Unis, l'Allemagne. La France a un déficit commercial de 80 millions d'euros. C'est bien l'illustration qu'on a un problème de compétitivité. Donc, si on veut dégrader le marché de l'emploi et le pouvoir d'achat, alourdissons le coût du travail. Le Medef ne sera pas complice. (…) Une négociation, c'est par définition un compromis. Mais je redis que les points bloquants, c'est que les organisations syndicales ne veulent pas remettre en cause un certain nombre de dispositifs de carrière longue, ce qui permettrait de dégager des marges de manœuvre financières sans augmenter le coût du travail. Et cela permettrait aussi de corriger des inégalités. »
Ni le bon format, ni la bonne méthode
« Le format du conclave a conduit à ce que chacun campe sur ses positions et soit moins en confiance. (…) Ce qui a manqué, c'est un accord sur les objectifs stratégiques. Est-ce qu'on est d'accord ou pas pour équilibrer dans la durée les régimes de retraite ? Est-ce qu'on est d'accord ou pas pour ne pas altérer la croissance, l'emploi et le pouvoir d'achat dans notre pays ? Et est-ce qu'on est d'accord, à partir de là, pour qu'on soit raisonnable quant au nombre de personnes qui peuvent partir avant l'âge légal ? »
Ce n’est pas la fin du monde
« Cet échec, ce n'est pas la fin du monde. Il est arrivé dans l'histoire, y compris dans l'histoire récente, qu'on n'aboutisse pas dans une négociation. On aura un accord à un moment ou à un autre, nous nous serons constructifs et de partie prenante pour reprendre les discussions. (…) Nous ne souhaitons pas que le gouvernement tombe. Pour autant, faut-il renier nos convictions qui nous paraissent correspondre à l'intérêt général du pays, c'est-à-dire des régimes sociaux stables, dont la pérennité soit assurée par de bons équilibres ? J'avoue avoir beaucoup de mal à décrypter le jeu politique que je trouve assez déconnecté des réalités du pays. La réalité du pays, c'est qu'on est en situation économique très précaire, très instable, que la France est en train de se déclasser, ce serait peut-être intéressant de le prendre en compte. »
Que chacun prenne ses responsabilités
« Nous ne reviendrons pas sur ce qu'on a dit depuis le départ. On ne peut pas nous soupçonner de déloyauté. Depuis le départ, j'ai fixé nos conditions et je n'en ai pas varié. Mes instances à l'unanimité ont validé les options que j'ai portées. Mais que chacun prenne ses responsabilités. Parce que je suis bien curieux de savoir quelle est la solution alternative qui permettrait, en revenant sur l'âge légal de départ en retraite, un des plus faibles d’Europe, d’équilibrer les régimes sociaux ce qui est la demande de nos concitoyens. Il faut que notre pays se redresse. Il faut travailler plus. »