
Patrick Martin aux 4 Vérités - Retraites : "Nous refusons catégoriquement la hausse des cotisations patronales"
Au micro des 4 Vérités le 18 juin, Patrick Martin est revenu sur l’échec du conclave sur les retraites. Il s’est dit réservé sur la participation du Medef à la nouvelle réunion prévue le 23 juin, mais considère qu’un accord sans la signature du Medef serait très relatif.
« Nous n'étions pas demandeurs que cette réforme soit réexaminée. Notre pays a besoin de travailler plus, et notre pays est en grande difficulté financière. Au rythme où vont les choses, rapidement nous ne pourrons plus payer les retraites. Le Medef a fait des annonces remarquables il y a huit jours, sur les carrières des femmes, sur l'usure, sur les invalidités, ces propositions ont été balayées d'un revers de la main. (…) On veut empiler des choses pour, à terme, arriver à quoi ? À ce que 50 % d'une classe d'âge ne partent pas à la retraite à 64 ans. Ceux qui devront travailler jusqu'au terme de leur carrière, travailleront pour les autres. »
« Nous nous étions accordés avec les organisations syndicales pour atteindre l'équilibre financier, ce qui est bien le moins. Ce qui est sur la table de la part des organisations syndicales, et je le redis, de la part de notre organisation patronale, va altérer ce rendement. On ne peut pas dire une chose et faire le contraire. »
« Les deux premières préoccupations des Français sont le pouvoir d'achat et la stabilité de nos régimes sociaux. Si on détricote le rendement financier des retraites, 14 % du produit intérieur brut, on altèrera le pouvoir d'achat, parce qu'à un moment ou à un autre, il faudra augmenter les cotisations et on fragilisera nos régimes sociaux. »
« Le Medef est de loin la première organisation patronale. Nous avons douze millions de salariés dans les 240 000 entreprises qui adhèrent au Medef. Je pense que la validité d’un accord sans notre signature serait très relative. »
« On a demandé, hier encore, aux syndicats, de nous expliquer comment on retombait sur nos pattes en termes d'équilibre financier. Ils n'ont pas apporté de réponse. Il y a une poche, en quelque sorte, qui est importante, qui est celle des carrières longues. C'est-à-dire qu'il y a à ce jour, et c'est inéquitable, des Français qui bénéficient d'un départ en retraite anticipé au motif qu'ils ont commencé à travailler tôt. Pour certains, c'est parfaitement justifié, pour d'autres pas. (…) Nous avons proposé des avancées, je redis, sur les femmes notamment. (…) On ne peut pas être dans un monde d'illusions. Tous les autres pays européens sont sur des taux de croissance nettement supérieurs à ceux de la France. La Pologne, six fois plus. L'Espagne, cinq fois plus cette année. L'Allemagne est en train d'accélérer. L'Allemagne vient d'annoncer 46 milliards de mesures de relance en faveur des entreprises. Et c'est là que je voulais en venir, des incitations financières à ce que les Allemands travaillent plus au-delà de l'âge légal de départ en Allemagne, qui est de 67 ans. »
« Il faut déjà qu'on ait un socle robuste et à ce jour, dans le cadre du conclave, on n'aboutit pas à un socle robuste. Nous, nous sommes en responsabilité. Il faut que les régimes sociaux français soient préservés dans la durée. »
« Nous refusons catégoriquement la hausse des cotisations patronales et je m'étonne que certains aient mis sur la table des mesures qui créent de la complexité et qui renchérissent le coût du travail. On a 80 milliards de déficit commercial chaque année. Tous les autres pays européens, dorénavant, sont en excédent commercial. On est rentré dans une guerre commerciale mondiale infernale. Ça ne nous a pas échappé avec les États-Unis, avec la Chine, avec d'autres. Et on voudrait, au même moment, dégrader la compétitivité française. Il y a un principe de cohérence. L'économie est une science exacte. On ne joue pas avec l'économie. On ne joue pas avec les entreprises. »
« Ça ne fait plaisir à pas grand monde de travailler plus longtemps, mais c'est un impératif pour notre pays. On est en train de se déclasser, y compris par rapport aux autres pays européens. Que veut-on ? Est-ce qu'on veut de la croissance, du pouvoir d'achat, de l'emploi ? Le PIB par habitant, le produit intérieur brut par habitant
français, est en train de décrocher très rapidement. Et après, on s'étonne que les Français aient des fins de mois difficiles. Je suis désolé, il faut travailler, il faut que les
entreprises puissent investir. »
« Nous souhaitons que les partenaires sociaux assument leurs responsabilités. Mais assumer ses responsabilités, ça ne doit pas être un slogan, ça doit être une réalité. Donc, il faut prendre par moment des décisions qui peuvent être impopulaires, qui peuvent être abrasives, mais elles doivent être prises. Depuis plus de deux ans et demi, l'investissement des entreprises est en train de baisser, alors qu'on devrait au contraire accélérer pour se décarboner, pour se digitaliser, pour gagner en compétitivité. Il y a une espèce d'inconscient collectif, on fait comme si la France était un monde à part. La France n'est pas un monde à part, qu'on le veuille ou non. »